Les marqueurs illocutionnaires holophrastiques du désaccord

Sémantisme et polyphonie fonctionnelle d’une classe de phraséologismes pragmatiques

DOI : 10.54563/lexique.120

p. 75-95

Résumés

Our focus is on a subclass of discourse markers that we have called “holophrasis” (Galatanu, 1984, 1992, 1997, 2016). We define “holophrasis” from linguistic (syntactic and semantic) and pragmatic criteria (types of language acts, stereotypical contexts, propositional content classes), as prefabricated expressions from a cognitive but also contextual point of view, which:

– mark the illocutionary force of an act of speech and the link between that force and a class of contexts in which the act is performed;

– incorporate a class of propositional content appropriate to these contexts;

– imply the propositional content of the occurrence of the act in situation.

From the theoretical perspective of semantics of the argumentative possibilities (Galatanu, 2018), particularly, its extension by a unified semantic approach of Illocutionary forces and their linguistic realizers, we hypothesize that these expressions coming from a pragmaticalization process (Dostie, 2004), have a complex semantics, enriched by the modal complexity of the illocutionary act they perform and by the complexity of the class of discursive contexts to which they refer. This semantics underlies their pragmatic polyfunctionality.

We illustrate our theoretical proposition with three holophrasis among those identified as expression of disagreement – ben voyons; allons, allons and et alors/après – and propose a conceptual model (Meunier, 2009) of the illocutionary acts concerned by these expressions.

Notre propos porte sur une sous-classe de marqueurs discursifs que nous avons appelés « holophrases » (Galatanu, 1984, 1992, 1997, 2016). Nous définissons les holophrases à partir de critères linguistiques (syntaxiques et sémantiques) et pragmatiques (types d’actes de langage, contextes stéréotypiques, classes de contenus propositionnels), comme des expressions préfabriquées d’un point de vue cognitif, mais également contextuel, qui :

– marquent la force illocutionnaire d’un acte de parole et le lien entre cette force et une classe de contextes dans lesquels peut émerger l’acte ;

– incorporent une classe de contenus propositionnels adéquats à ces contextes ;

– implicitent le contenu propositionnel de l’occurrence de l’acte en situation.

Dans la perspective théorique de la sémantique des possibles argumentatifs (Galatanu, 2018), notamment de son prolongement par une approche sémantique unifiée des forces illocutionnaires et de leurs réalisateurs linguistiques, nous avançons l’hypothèse que ces expressions issues d’un processus de pragmaticalisation (Dostie, 2004), ont un sémantisme complexe, enrichi par la complexité modale de l’acte illocutionnaire qu’elles réalisent et par la complexité du contexte discursif auquel elles renvoient. Ce sémantisme fonde leur polyfonctionnalité pragmatique.

Nous illustrons notre proposition théorique par trois holophrases parmi celles identifiées comme expressions du désaccord – ben voyons ; allons, allons et et alors/après  et proposons une modélisation conceptuelle (Meunier, 2009) des actes illocutionnaires concernés par ces expressions.

Plan

Notes de la rédaction

Received: March 2021 / Accepted: July 2021
Published online: December 2021

Texte

1. Introduction

Notre propos porte sur une classe de phraséologismes pragmatiques, les marqueurs discursifs (Fraser, 1996 ; Erman, 2001 ; Dostie, 2004 ; Gülich, 2006 ; Hancil et alii, 2011) polylexicaux. À l’intérieur de cette classe, nous nous proposons d’aborder le sémantisme et le fonctionnement pragmatique d’une sous-classe de marqueurs illocutionnaires, les holophrases polylexicales1 (Galatanu, 1984, 1992, 1997, 2014).

L’objectif de notre article est donc d’ordre théorique : définir les holophrases en tant que marqueurs illocutionnaires et proposer des principes qui fondent leur polyfonctionnalité pragmatique et leur complexité sémantique. Nous nous proposons de nous arrêter sur les holophrases polylexicales issues d’un processus de pragmaticalisation, qui répondent aux conditions que doivent remplir les phraséologismes pragmatiques et qui, de ce fait, s’inscrivent dans la lexiculture2 d’une communauté linguistique.

Pour illustrer le fonctionnement de ces marqueurs discursifs illocutionnaires dans la réalisation des actes de langage, nous examinons trois holophrases représentatives des actes qui expriment le désaccord pour faire apparaître leur rôle dans l’élaboration d’une potentielle ontologie sémantique des forces illocutionnaires dans les sémio-sphères des interactions verbales3 (Galatanu, 2017).

Dans une première partie (section 2), nous expliquons le concept d’holophrase et argumentons sa pertinence. Avant de définir les holophrases, nous retraçons rapidement l’historique de ce concept, tel que nous l’avons proposé et illustré depuis nos premiers textes portant sur les actes de langage et sur leurs marqueurs discursifs4. Nous allons ainsi essayer de justifier son élaboration et le choix de sa désignation pour rendre compte de certaines entités lexicales et expressions linguistiques figées5 porteuses de valeurs illocutionnaires et implicitant leurs contenus propositionnels. Ces expressions sont susceptibles de fonctionner seules dans les occurrences de parole, comme des énoncés complets (les exemples de 1 à 4). Elles sont également susceptibles, pour la plupart, de fonctionner comme des « ouvreurs d’énoncés » qui explicitent les contenus propositionnels d’actes illocutionnaires (exemples (5) et (6)).

(1)

[…] C’est sérieux, dit-il, et un jour je le ferai. Mais oui, dit-elle, mais oui, bien sûr. Je le ferai, répète-t-il, je te dis que je le ferai. Ben voyons, dit-elle. Je le ferai, crie-t-il, on devine, dans l’obscurité, que les mains de la femme se portent à ses oreilles. Tais-toi, crie-t-elle […] (BENZIGLIO Jean-Luc, La boîte noire, 1974, p. 57, dans FRANTEXT)

(2)

Plus de place en prison ? Le laxisme de la justice ? Allons, allons… (Google, Recherche avancée)

(3)

– Je n’ai pas l’habitude de déranger les tourtereaux…

– Mais il n’y a rien de ce que tu crois entre John et moi !

Allons donc !

– Je te jure !

– Arrête donc de jurer à tout propos, surtout quand ta cause est mauvaise.
[…] (BENJAMIN Laura, L’Opéra au fond des mers, 1983, p. 119, dans FRANTEXT)

(4)

– Tu as cru ce qu’il te disait ? - Penses- tu ? J’ai bien compris qu’il mentait. (Lexis)

(5)

« Et sa chambre, vous l’avez relouée ? » Madame Scheemd s’indigna : « Non mais, dites donc, pour qui me prenez-vous ? » (Exbrayat, Ces messieurs de Delft)

(6)

– J’aurais pu y aller le matin voir le défilé…

Allons donc, toi sortir le matin !

– Et qu’est-ce que j’ai fait d’autre ?

– Voyons. Laisse-moi réfléchir. Tu as regardé la parade militaire à la télé. (Doubrovski Serge, Le livre brisé, 1989, p. 166, Frantext).

Dans un deuxième temps (section 3), nous illustrons notre proposition théorique par l’analyse des trois holophrases marqueurs polylexicaux illocutionnaires du désaccord qui appartiennent à la classe plus large des phraséologismes pragmatiques6. Notre analyse s’appuie sur des énoncés recueillis dans la base de données FRANTEXT.

Enfin, dans la section 4, nous avançons, en guise de conclusion, l’idée de l’élaboration d’une ontologie sémantique des forces illocutionnaires du désaccord à partir de l’analyse sémantico-discursive des holophrases qui les réalisent.

2. Le concept d’holophrase

Nous allons évoquer rapidement la réflexion sur laquelle s’appuie le concept d’holophrase, pour proposer ensuite une définition7 des expressions holophrastiques, en tant que marqueurs discursifs illocutionnaires et méta-illocutionnaires. Nous allons aussi justifier notre choix en le confrontant à d’autres termes (par exemple celui d’acte de langage stéréotypé proposé par Kauffer, 2011, 2012) utilisés pour se référer à des expressions linguistiques comme Allons, allons !, Ben voyons !, Non, mais ça va pas (la tête) !, Qu’à cela ne tienne !, etc.

À la réflexion théorique sur la polyfonctionnalité pragmatique de ces expressions, nourries par les études sur « les mots du discours » (Ducrot et alii, 1980), par les études sur le figement linguistique (Aijmer, 1997 ; Erman, 2001 ; Dostie, 2004) et sur le phénomène d’indirection et la distinction entre marqueur de force illocutionnaire et marqueur de contenu propositionnel (Anquetil, 2014), se sont ajoutées nos réponses à trois interrogations relevant de la linguistique appliquée et portant sur les difficultés liées aux définitions lexicographiques de ces expressions (Galatanu, 1988), les difficultés de trouver des « hétéronymes » dans leur traduction, ou à tout le moins des équivalents fonctionnels se situant au même niveau sémantico-pragmatique (Galatanu, 1984, 1992, 2011, 2014 ; Galatanu & Pino-Serrano, 2012) ainsi que les difficultés rencontrées dans l’explicitation et l’apprentissage de ces expressions dans le processus d’enseignement des langues étrangères, par exemple les langues romanes (Galatanu, 1997).

À partir des hypothèses observationnelles formulées dans le cadre de plusieurs recherches empiriques et du cheminement théorique qu’elles ont permis, nous pouvons actuellement redéfinir et expliquer les fonctions des holophrases, dans le cadre d’une approche théorique sémantico-pragmatique unifiée des forces illocutionnaires, appréhendées comme des formes complexes de modalisation d’énonciation8, et de leurs réalisateurs linguistiques, la Sémantique de l’(Inter)action Verbale (désormais, la SIV).

2.1. Le concept d’holophrase dans une approche modale de l’acte illocutionnaire et de ses réalisateurs linguistiques

Nous avions proposé, dès 1981 et développé par la suite9, une interprétation des actes illocutionnaires (Austin, 1962 ; Searle, [1969]1972) en termes de modalités illocutionnaires10. Ces modalités illocutionnaires sont envisagées comme des modalités d’énonciation complexes, des ensembles de valeurs modales, hiérarchiquement organisées, se rapportant à la configuration d’attitudes (cognitive, volitive, affective, etc.) du sujet énonciateur (Galatanu, 1981, p. 173, 1984, p. 62).

C’est dans cette perspective que nous avons cherché à identifier les différentes classes de réalisateurs linguistiques « directs » des forces illocutionnaires envisagées comme ensembles d’attitudes subjectives et intersubjectives qui sous-tendent l’accomplissement des actes illocutionnaires. Parmi ces marqueurs de force illocutionnaire, nous avons proposé l’analyse des marqueurs discursifs illocutionnaires, dont les holophrases.

Le terme d’holophrase, emprunté d’une part à la théorie de l’acquisition du langage (Corder, 1971) et d’autre part à la linguistique guillaumienne (1956-1957), nous a semblé convenir pour désigner des mots ou des expressions issues d’un processus de pragmaticalisation11, entendu comme un phénomène de migration de leurs significations vers la zone pragmatique, c’est-à-dire vers l’acquisition de fonctions pragmatiques. Nous rappelons que ce processus peut être une migration du sens (lexical et/ou grammatical) vers le sens de marqueur discursif, comme c’est le cas de décidément, ou un processus d’acquisition de fonctions pragmatiques, de conventionnalisation des effets de sens dans l’usage de l’expression, produisant des phraséologismes pragmatiques, comme dans le cas de Qu’à cela ne tienne !, Penses-tu !, Non, mais ça va pas (la tête) ?, Non, mais je vais me gêner !, Et ta sœur !, Mon œil !, N’importe quoi !, etc.

Ces expressions, y compris les expressions mono-lexicales, comme décidément, fonctionnent comme des énoncés complets et par voie de conséquence, on peut dire qu’elles ont le statut de phrases qui, lorsqu’elles sont énoncées, ont la valeur d’une prédication modale illocutionnaire complète et complexe : prédication modale complexe (valeur complexe illocutionnaire) et prédication dictale correspondant au contenu propositionnel, selon la formule proposée par Searle ([1969]1972, pp. 69-70) F(p), où F= le ‘potentiel de force illocutionnaire de la phrase’ et p= son ‘potentiel de contenu propositionnel’. Ceci explique le choix que nous avons fait de désigner ces expressions par le terme d’holophrase. Un élément important qui distingue les holophrases des autres marqueurs illocutionnaires est le fait qu’elles implicitent le contenu propositionnel de l’occurrence de parole, tout en incorporant une classe de contenus propositionnels possibles, définie par la règle de contenu propositionnel et les règles préliminaires qui précisent les conditions d’apparition de ce contenu propositionnel12. Certaines holophrases incorporent également une classe de contextes de l’interaction verbale et de l’intersubjectivité, qui constituent « l’historique » de l’interaction verbale concernée, comme c’est le cas pour décidément que nous paraphrasons par ‘plusieurs événements (axiologiquement négatifs, indésirables ou tout au moins non désirés par l’énonciateur) amènent l’énonciateur (l’obligent ou s’imposent à lui comme une nécessité) à RECONNAITRE qu’il doit y avoir une cause commune qui fait que ces événements se produisent, mais que lui, l’énonciateur, ne connaît pas’. (Galatanu, 1992)13.

2.2. Le concept d’holophrase dans le cadre de la Sémantique de l’(Inter)action verbale

Notre cadre théorique actuel est celui d’une proposition d’approche sémantique unifiée des actes illocutionnaires et de leurs réalisateurs linguistiques, la Sémantique de l’(Inter)action Verbale – la SIV, complémentaire des approches pragmatiques. Pour une description détaillée de ses postulats, hypothèses et concepts, nous renvoyons à ses textes fondateurs et à plusieurs recherches individuelles et collectives14. Dans le cadre de cet article, nous allons reprendre uniquement quelques éléments indispensables à la présentation du rôle des holophrases dans l’analyse des interactions verbales.

2.2.1. Pour une sémantique unifiée des actes illocutionnaires et de leurs réalisateurs linguistiques

La SIV vise essentiellement la construction d’un pont conceptuel entre les représentations conceptuelles et sémantiques de l’acte illocutionnaire, à travers les significations des verbes et des nominaux qui le désignent dans une langue-culture, et ses réalisations linguistiques dans l’interaction verbale.

Le corollaire de cet objectif central de la SIV est que le modèle de représentation conceptuelle et sémantique de l’acte devrait avoir un pouvoir explicatif, voire prédictif, de la mobilisation des formes linguistiques dans les occurrences de parole. Cela nous ramène aussi à l’intégration des holophrases en tant que marqueurs illocutionnaires parmi les éléments difficiles à traduire d’une langue à l’autre.

La SIV ambitionne ainsi d’offrir des fondements sémantiques robustes à la lexiculture des phraséologismes pragmatiques. Nous avons avancé l’idée (qui est le postulat empirique fondateur de la SIV) que nous pouvons conceptualiser un acte illocutionnaire spécifique si nous pouvons reconnaître et formuler une intention illocutionnaire spécifique à partir de l’usage performatif d’une forme linguistique.

Un second postulat complète la fondation de la SIV15. Ce postulat avance le fait que le noyau de signification16 du verbe de communication qui désigne un acte illocutionnaire donné dans une langue-culture représente une configuration d’attitudes modales, correspondant aux règles d’emploi de performance de l’acte, mais surtout aux règles d’emploi du marqueur illocutionnaire concerné dans cette langue.

Nous avons pu avancer ainsi l’hypothèse que nous pouvons construire la configuration des valeurs modales qui sous-tendent un acte illocutionnaire à partir de l’analyse de la signification, notamment des propriétés essentielles de cette signification, identificatoires, qui forment la strate nucléaire du verbe illocutionnaire performatif et/ou du nominal qui désigne(nt) l’acte17. Les éléments de cette strate nucléaire sont associés à d’autres représentations sémantiques (d’autres mots du lexique de la langue concernée), formant l’ensemble ouvert de stéréotypes, ancrés dans le cinétisme culturel.

Pour l’analyse des holophrases, nous pouvons formuler l’hypothèse que leur complexité sémantique et pragmatique s’explique par la complexité modale de la conceptualisation de l’acte dans une langue-culture.

2.2.2. Les holophrases : reformulation de leur définition et description de leurs fonctions dans le cadre de la SIV

Nous pouvons maintenant positionner le concept d’holophrase et son rôle en SIV, par rapport à d’autres marqueurs discursifs illocutionnaires.

Les holophrases sont des expressions linguistiques (mono-lexicales ou polylexicales figées) qui ont plusieurs fonctions :

– marquer la force illocutionnaire d’un acte de parole et le lien entre cette force et une classe de contextes dans lesquels peut émerger l’acte ; ceci revient à poser la possibilité de l’existence d’une « polysémie illocutionnaire » ou poly-fonctionnalité illocutionnaire ; en ce sens, leur fonction correspond à celle de marqueurs de réalisation d’un acte illocutionnaire (MRAI) définie par Dostie (2004) ;

– impliciter le contenu propositionnel de l’acte en situation, tout en incorporant une classe de contenus propositionnels en adéquation avec une classe de contextes de leur usage – et de ce fait, remplir également une fonction méta-illocutionnaire et méta-discursive.

Les critères et principes aussi bien pragmatiques que sémantico-syntaxiques auxquels la définition des holophrases, telle que nous la formulons actuellement en tant que marqueurs discursifs, rejoignent pour l’essentiel les analyses de ces marqueurs proposées par plusieurs chercheurs (Lehmann [1982]1995 ; De Mulder, 2001 ; Dostie, 2004, 2007).

Toutefois, notre approche se distingue des approches mentionnées sur deux points, qui visent essentiellement l’analyse des holophrases, mais interrogent également les principes des marqueurs illocutionnaires en général (préfixes performatifs, verbes modaux, quasi-commentaires parenthétiques).

Il s’agit d’abord du traitement de l’attrition sémantique, puisque notre approche avance, à l’opposé de celle de leur appauvrissement sémantique, l’enrichissement de leur sémantisme, rejoignant ainsi le point de vue de Dostie (2004, 2007). Cette richesse sémantique explique leur poly-fonctionnalité illocutionnaire.

Il s’agit ensuite de leur poly-fonctionnalité discursive, les holophrases à valeur et fonction illocutionnaires appartenant à la sous-catégorie de marqueurs illocutoires (Dostie, 2004), mais fonctionnant également comme marqueurs méta-illocutionnaires et méta-discursifs. Cette propriété est fondée sur le principe de l’incorporation de l’histoire discursive qui conduit à la production de l’acte, comme nous l’avions montré avec l’analyse de l’holophrase mono-lexicale Décidément (Galatanu, 1992, 1997), ou avec celle de l’holophrase polylexicale Allons, allons ! (Galatanu, 2016).

La sous-classe d’holophrases qui nous intéresse ici, les holophrases polylexicales répond par ailleurs aux critères et principes qui définissent les phraséologismes ou phrasèmes pragmatiques (voir Dostie & Sikora, dans l’introduction du présent numéro)18 :

  • Elles sont formées d’au moins deux unités utilisées en contiguïté ;

  • Elles répondent au critère de préfabrication du point de vue cognitif, ce qui représente un argument fort pour les désigner par le terme d’holophrase ;

  • Elles ont, par définition, des fonctions pragmatiques ;

  • Leur emploi est contraint par la classe de situations de communication qu’elles incorporent dans leur sémantisme.

3. Les holophrases du désaccord

Les actes de langage qui expriment le désaccord ne sont pas analysés, à notre connaissance, dans la perspective d’une ritualisation spécifique, reconnue comme telle par les travaux sur la politesse (Brown & Levinson, 1987 ; Goffman, 1974 ; Kerbrat-Orecchioni, 2005), ni dans les études et la définition des actes illocutionnaires phatiques (Récanati, 1981), comme la salutation, ou des actes comportatifs (Austin, 1962) ou expressifs (Searle, 1969, 1975), comme les excuses, les compliments, les remerciements.

En revanche, le désaccord a donné lieu à de nombreuses études, en particulier pluri- ou interdisciplinaires : en sciences de l’information et de la communication, en philosophie, éthique, sciences du langage, sociologie, psychologie sociale. Le désaccord a été désigné, entre autres, comme une forme de conflit qui fait apparaître les difficultés, voire l’impossibilité de négocier la communication entre interactants (Waldron & Applegate, 1994).

En rhétorique, il est lié à la délibération, qui permet justement de le dépasser (Perelman, 1977), ou encore, en pragmatique, aux normes de politesse qui permettent de l’atténuer. En analyse sémantico-discursive, le désaccord est présent dans de nombreuses études (voir, à titre d’exemple, Cozma, 2020).

Notre intérêt en SIV se focalise sur les actes illocutionnaires en lien avec le désaccord et sur les holophrases susceptibles de réaliser ces actes.

3.1. Les actes illocutionnaires du désaccord

Les actes illocutionnaires qui expriment le désaccord, tels qu’ils sont conceptualisés par les verbes qui les désignent, sont nombreux et nuancés, tout au moins en français et probablement dans de nombreuses autres langues, allant de la remise en question des arguments susceptibles de conforter la « vérité » de l’autre – affirmation, pensée, croyance, décision – (OBJECTER, RÉTORQUER) jusqu’au rejet pur et simple de cette « vérité » (CONTREDIRE, RÉFUTER, NIER), ou encore, des actes inscrits explicitement dans un dialogue (CONTREDIRE, RIPOSTER) ou implicitant l’élément dialogique (NIER, RÉFUTER).

Dans la perspective de la SIV, nous pouvons proposer une conceptualisation sémantique de cette sémio-sphère de l’(inter)action verbale à partir de postulats empiriques fondés sur le sémantisme des verbes qui les désignent et qui, en structure performative, représentent des marqueurs illocutionnaires. Ce que nous aimerions montrer dans ce qui suit, c’est que l’analyse de plusieurs phraséologismes, marqueurs illocutionnaires holophrastiques permet, selon notre hypothèse, de nuancer la zone d’expérience langagière du désaccord et d’en proposer une ontologie sémantique flexible et fluide.

Compte tenu de la variété des forces illocutionnaires telles qu’elles sont proposées par les verbes illocutionnaires français, nous allons représenter cette sémio-sphère de l’interaction verbale en français, par la conceptualisation de la forme la plus générale : DIRE SON DÉSACCORD, le verbe dire étant l’archilexème des verbes illocutionnaires.

Le Tableau 1 propose ainsi la représentation sémantique du syntagme verbal dire son désaccord et la représentation conceptuelle d’une série d’actes illocutionnaires du désaccord. La première colonne présente les propriétés essentielles, nucléaires de l’expression du désaccord19 (N). La deuxième colonne rend compte des stéréotypes, relativement durables, ancrés dans les dynamiques culturelles, associés par un lien argumentatif aux éléments du noyau. Ils constituent un ensemble ouvert de stéréotypes (Sts). Enfin, la troisième colonne propose des séquences discursives virtuelles qui associent une holophrase du désaccord, susceptible de réaliser la force illocutionnaire du DIRE SON DÉSACCORD dans des actes de parole, aux éléments des stéréotypes (appartenant au noyau ou aux représentations stéréotypiques qui leur sont associées), c’est-à-dire aux possibles discursifs argumentatifs (PA). Nous rappelons qu’en définissant les holophrases, nous avons avancé l’idée qu’elles sont susceptibles de réaliser cet acte de DIRE SON DÉSACCORD, en mobilisant l’une des forces illocutionnaires portées par les actes CONTREDIRE, NIER, OBJECTER, RÉFUTER, RÉPLIQUER, RIPOSTER…

Tableau 1. DIRE SON DÉSACCORD20

Tableau 1. DIRE SON DÉSACCORD20

C’est le déploiement dans l’énoncé du potentiel discursif des expressions étudiées ici qui nous permettra de nuancer le type de réalisation du désaccord (exemple 7)21. Ce potentiel discursif de l’expression du désaccord nous a également permis de construire des tests sémantiques pour valider nos hypothèses sur leur sémantisme, pour les exemples 8 et 9.

(7)

– […] Rien de pire que l’automne pour le courrier ! – Allons, allons, regardez, tout n’est pas si noir, on nous aime.

(8)

[…] C’est sérieux, dit-il, et un jour je le ferai. Mais oui, dit-elle, mais oui, bien sûr. Je le ferai, répète-t-il, je te dis que je le ferai. Ben voyons, dit-elle. Je le ferai, crie-t-il, on devine, dans l’obscurité, que les mains de la femme se portent à ses oreilles. Tais-toi, crie-t-elle […] (BENZIGLIO Jean-Luc, La boîte noire, 1974, p. 57)

(9)

[…] Pasquale prétend que ce sont des mots. Et après ? L’homme ne vit pas seulement de pain ! Ce sont des mots justement qui nous séparent. Et nous ne parvenons pas à établir entre nous des relations d’égalité. […] (GROULT Benoîte, GROULT Flora, Journal à quatre mains, 1994, première partie, p. 62)

Dans l’exemple (7), le déploiement de allons, allons, ici en position d’ouvreur d’énoncé, n’est pas une réfutation du contenu propositionnel de l’acte qui précède, axiologiquement négatif, mais il marque le rejet d’un certain degré d’intensité du « mal », en apportant un argument à orientation positive : tout n’est pas si noir, on nous aime.

Dans l’exemple (8), il n’y a pas de déploiement de ben voyons ! par l’actualisation du contenu propositionnel de l’acte illocutionnaire, qui serait la réfutation de un jour je le ferai. Mais notre hypothèse de la réfutation de l’ensemble de l’acte illocutionnaire du destinataire peut être testée par l’usage de cette holophrase en position de connecteur illocutionnaire avec un contenu propositionnel comme je n’en crois rien ! ou tu mens ! qui sont des déploiements sémantiquement acceptables.

Quant à l’exemple (9), le locuteur ne réfute pas l’énoncé Ce sont [que] des mots. Ce qui est remis en cause c’est un possible déploiement discursif de cet énoncé qui serait, par exemple, ça ne compte pas, ou encore ils n’ont aucune valeur / importance, etc.

Une première conclusion s’impose sur l’incidence de la réfutation, différente dans nos trois exemples : sur l’ensemble du contenu propositionnel réfuté, pour ben voyons !, sur l’intensité de la valeur axiologique négative du contenu propositionnel, dans le cas de allons, allons !, sur les conclusions que l’on peut tirer d’une assertion du destinataire de l’acte de réfutation, pour et après ?.

Notons que ces trois holophrases s’inscrivent dans « des paradigmes holophrastiques du désaccord ». Par exemple, ben voyons ! souffre la substitution avec tu parles!, à d’autres!, etc. ; allons, allons! est interchangeable en contexte de désaccord avec voyons, voyons !.

Allons, allons ! et voyons, voyons ! sont des holophrases issues d’une « réduplication par convention de discours » (Dostie, 2011, p. 151). Le mécanisme discursif à l’origine de cette conventionnalisation est, selon Dostie, celui d’une modalisation incidente au dire, que nous appelons modalisation discursive d’énonciation. Dans le cas du désaccord, la force illocutionnaire d’insistance soulignée par Dostie, fonctionne comme une valeur méta-illocutionnaire incidente à la réfutation du degré d’intensité de la valeur axiologique négative d’un acte qui la précède.

Quant à l’holophrase et après ?, elle a la même fonction illocutoire de réfutation des conclusions qu’on peut tirer de l’énoncé « à réfuter » que l’holophrase et alors ?, ou même, tout au moins en partie, de l’holophrase qu’à cela ne tienne !22.

3.2. Ben voyons, allons, allons, et après/alors

Nous avons établi un inventaire, très provisoire23, des expressions holophrastiques du désaccord, à partir de plusieurs dictionnaires24 et nous l’avons conforté avec la base d’expressions figées établie par Denis Le Pesant (consultée en mai 2014)25.

Les trois holophrases du désaccord que nous étudions ici ont été testées et répondent aux critères des marqueurs discursifs polylexicaux, issus d’un processus de pragmaticalisation : la paradigmatisation, la persistance, la coalescence, la superposition, la divergence (Dostie, 2004). Nous ne reprenons pas cette analyse, partiellement présentée dans d’autres études26. Ce qui nous intéresse ici est le sémantisme des holophrases du désaccord, en lien avec leurs contextes d’usage, en particulier avec l’incidence de l’acte de réfutation.

Notons que ce critère n’est pourtant pas bien représenté dans le sémantisme des 14 verbes illocutionnaires que nous avions identifiés comme désignant les actes de langage du désaccord27. Seul le verbe objecter lexicalise la réfutation par un contre-argument, une objection ; les autres neutralisent cette propriété.

3.2.1. Les holophrases d’un désaccord total : le cas de Ben voyons !

Notre analyse sémantico-pragmatique de Ben voyons ! s’appuie sur les 70 énoncés tirés de la base de données Frantext, qui se situent entre 1915 et 2008. La réfutation, explicitée ou non par le cotexte, porte sur le contenu propositionnel d’un acte du destinataire : une accusation considérée injuste (10), ou absurde (11), des mensonges (12).

(10)

[…] Inutile de mentir ! J’avais exactement vingt mille francs (CFA) dans ce portefeuille hier matin, cinq mille francs ont disparu. Alors ? moue idiote. Gifle. Ben voyons. Rien que ça ? C’est la meilleure. Je n’ai jamais volé un centime à mes parents. Jamais. […] (BAYON Bruno, Le Lycéen, 1987, p. 145)

(11)

[…] quand, vexé, furieux, malheureux, il avait élevé la voix à son tour, disant qu’elle aurait pu le prévenir, le mettre en garde, elle s’était récriée que bien sûr, ben voyons, et puis quoi encore : le prévenir aussi n’est-ce pas que ça ne se buvait pas, la peinture, […] (BENOZIGLIO Jean-Luc, Tableau d’une ex, 1989, p. 101)

(12)

[…] la voiture, elle n’était pas à vous !

– Un moment d’égarement, elle était rangée le long du trottoir, le moteur tournait, je n’ai pas pu résister, un geste stupide.

– Ben voyons… On résume […] (JONQUET, Thierry, Les Orpailleurs, 1993, p. 40)

La réfutation porte de manière explicite, grâce au cotexte, sur le contenu propositionnel et sur la force illocutionnaire d’un acte de langage qui la précède. Nous pouvons remplacer cette holophrase par d’autres holophrases comme tu parles! ; non, mais ça va pas! ; à d’autres !, etc., ce qui permet d’établir une sous-classe d’actes illocutionnaires du désaccord, que nous pouvons nommer « les holophrases du désaccord total ». Par ailleurs, le déploiement du contenu propositionnel qu’implicite cette holophrase par des énoncés comme tu mens, je n’en crois rien, tu te trompes, tu as tort, c’est faux / archi-faux produit des séquences discursives sémantiquement acceptables, ce qui confirme l’incidence de la réfutation sur l’ensemble de l’acte auquel elle répond : force illocutionnaire et contenu propositionnel.

3.2.2. Les holophrases d’un désaccord rassurant : le cas de Allons, allons !

Notons d’abord que cette holophrase, que nous avons étudié ailleurs (Galatanu, 2016)28 est polyfonctionnelle, susceptible de réaliser plusieurs actes illocutionnaires, de réfutation rassurante, mais aussi et surtout des actes incitatifs, comme CONSEILLER, DEMANDER D’OBÉIR (voir l’analyse de Sirdar-Iskandar, 1983). Elle est caractérisée également par une polyfonctionnalité discursive, les actes illocutionnaires mentionnés étant sur-modalisés par un acte méta-illocutoire d’insistance (voir Dostie, 2011). Nous n’avons sélectionné pour cette étude et pour celle de 2016 que les situations dans lesquelles la fonction illocutionnaire du désaccord était confirmée par nos tests. Tous les exemples d’expression du désaccord par allons, allons ! ont été soumis à deux tests sémantiques construits en SPA et dans le prolongement de cette approche théorique en SIV29.

Le premier test est celui de l’enchaînement de l’holophrase avec des énoncés exprimant un acte rassurant : je te rassure, tu peux / vous pouvez être rassuré(s), tout va bien, tout se passera bien, ou alors il vaut mieux pour toi, ou reconnais-le30, etc.

Le second test est celui du déploiement d’un contenu propositionnel exprimant la réfutation soit d’un PA de l’acte précédent, soit de l’intensité de l’axiologisation négative de celui-ci.

En fait, en contexte de désaccord, à la réfutation du degré d’intensité de la valeur négative, ou tout simplement du contenu propositionnel d’un acte s’ajoute une valeur illocutionnaire RASSURER (13 et 14), ou CONSEILLER (15). La réfutation totale, comme dans le cas de l’usage de l’holophrase Ben voyons !, n’est pas validée pour allons, allons par le test du déploiement d’énoncés – contenus propositionnels comme ‘tu mens’, ou encore ‘ce que tu dis est faux’, au risque de faire perdre à l’acte sa valeur rassurante.

(13)

Alors ce serait la faute de cette affreuse circulaire Taubira de politique pénale […] ? … Allons, allons, chères amies, chers amis, vous savez la valeur d’une […] (Google, consulté le 14/04/2014)

(14)

Plus de place en prison ? Le laxisme de la Justice ? Allons, allons… (Google, consulté le 14/04/2014)

(15)

Allons, allons, oui, c’est un 2 étoiles, oui, les chambres sont petites, oui, c’est un peu bruyant et encore cela dépend de la météo extérieure, mais il faut donner du crédit à ce petit hôtel bien placé au centre de Munich, Marienplatz n’étant qu’à 10 minutes à pied et encore en traînant. (Au centre de Munich tout de même, avis écrit le 26 juin 2013, Google, recherche avancée).

L’exemple (15), que nous reprenons à l’article de 2016, explicite clairement l’incidence de la réfutation sur l’intensité de la valeur axiologique négative d’un énoncé et la double valeur illocutionnaire de l’acte de langage que marque l’holophrase allons, allons. Les arguments en défaveur de l’hôtel ne sont pas remis en cause, au contraire, la qualité modeste de l’hôtel n’est pas réfutée ; ce qui est réfuté c’est l’insistance sur cette évaluation négative, puisqu’il y a des arguments en faveur du choix de cet hôtel qui sont déployés dans cet exemple.

3.2.3. Les holophrases d’un désaccord différé : le cas de Et alors ?/! et Et après !/?

Les 603 occurrences de Et après ! que nous avons recueillies dans Frantext (entre 1830-2011) illustrent bien l’un des principes qui guident l’interprétation des expressions comme des marqueurs discursifs issus d’un processus de pragmaticalisation (Lehmann, 1995 ; Hopper, 1991 ; De Mulder, 2001 ; Dostie, 2004) : la persistance. Cette expression est en effet polysémique, tout comme Et alors !, beaucoup de ses emplois étant temporels.

Dans la sémio-sphère du désaccord, les tests sémantiques ont été : 1) le déploiement d’un énoncé proposant un contenu propositionnel de l’acte RÉFUTER (tu mens, c’est faux, je n’en crois rien) et 2) sa substitution par d’autres holophrases de la réfutation (tu parles ; à d’autres ; qu’à cela ne tienne ; ben voyons ; allons, allons). Le premier test, appliqué aux exemples qui suivent, fait apparaître la résistance à un déploiement discursif d’un contenu propositionnel comme tu mens, c’est faux, etc., déploiement non acceptable sémantiquement (16, 16’). Le second test montre que si la substitution par qu’à cela ne tienne, éventuellement par allons, allons, est possible, la substitution par tu parles, ben voyons (17, 17’) et d’autres holophrases de « réfutation totale » d’un acte illocutionnaire n’est pas possible.

(16)

[…] Le grammairien au styliste : hors d’ici, esprit confus et irrationnel. Le styliste : tu as toujours raison en ce que tu avances et prétends, j’y consens. Et après ? Rusé, prudent, rigoureux, circonspect, tu avances d’un demi-millimètre en un siècle. Pendant ce temps, inattentif, courageux, intuitif, je crée du sens, oui, du sens […] (SERRES Michel, Le Tiers-Instruit, 1991, INSTRUIRE, p. 127)

(16’)

# […] Le grammairien au styliste : hors d’ici, esprit confus et irrationnel. Le styliste Et après, tu mens/c’est faux.

(17)

Quand vous discutez avec un individu, ne lui laissez jamais prendre l’avantage, sans quoi, il en abusera. Il rogne ? Il en dévide ? Mais vous lui répondez : « Et après ? » Et vous le regardez […]. (AYME Marcel, Nouvelles complètes, 2002, KNATE - 1935-1938, p. 490)

(17’)

# Quand vous discutez avec un individu, ne lui laissez jamais prendre l’avantage, sans quoi, il en abusera. Il rogne ? Il en dévide ? Mais vous lui répondez : « Ben voyons ! / tu parles ». Et vous le regardez […]

L’espace de cet article ne nous permet pas de détailler l’analyse du potentiel discursif (argumentatif) de chacune de ces holophrases ; une étude approfondie reste à faire, pour rendre compte de la classe de contenus propositionnels de l’acte illocutionnaire et de la classe de contextes dans lesquels l’incidence de la réfutation se trouve justifiée.

4. Conclusion : pour une ontologie sémantique de la réfutation

Nous avons esquissé une démarche de construction d’ontologies sémantiques dans le domaine de l’(inter)action verbale (Galatanu, 2017), complémentaire aux ontologies onomasiologiques proposées par les philosophes du langage (à travers leurs descriptions et les typologies des actes illocutionnaires proposées).

Dans la perspective de la SIV, cette ontologie, ou plus exactement ces ontologies sémantiques des différentes sémio-sphères d’interactions verbales, sont basées sur les représentations des actes illocutionnaires, telles qu’elles sont conceptualisées dans et par les significations des verbes qui les désignent dans une langue et d’une culture.

Notre recherche exploratoire sur les trois holophrases sélectionnées visait uniquement à illustrer notre proposition théorique et notre construction du concept d’holophrase. Toutefois, les résultats ont fait apparaître l’existence d’un critère linguistiquement intéressant pour une typologie des actes illocutionnaires dans la zone de la réfutation. Il s’agit de distinctions liées au niveau d’incidence de la réfutation : un acte de langage dans son ensemble (la configuration modale de la force illocutionnaire et le contenu propositionnel), le degré d’intensité d’une valeur axiologique négative mobilisée par un contenu propositionnel, le potentiel de déploiement argumentatif d’un contenu propositionnel.

Un modèle conceptuel (voir Meunier, 2009) des actes illocutionnaires de la réfutation devrait ainsi intégrer, parmi les autres propriétés des forces illocutionnaires hiérarchisées, l’incidence de la réfutation et de ce fait deux autres dimensions : la pluralité des forces illocutionnaires en jeu dans la réfutation, comme on l’a vu dans l’usage de l’holophrase allons, allons, et l’espace intersubjectif créé par la fonction d’activation du potentiel argumentatif de l’énoncé du contenu propositionnel, des holophrases de la série et après, et alors, qu’à cela ne tienne31.

Nous pensons avoir montré que le concept d’holophrase, et donc l’étude des marqueurs illocutionnaires holophrastiques, peut fournir des fondements sémantico-pragmatiques robustes dans l’analyse des représentations conceptuelles plus nuancées des actes illocutionnaires dans une langue-culture. Ces fondements concernent justement l’imprégnation culturelle cinétique de ces représentations, à travers le processus permanent de pragmaticalisation et de figement d’expressions dans les différentes sémio-sphères de l’interaction verbale.

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Notes

1 Comme nous le verrons dans la section 2, consacrée au concept d’holophrase, les holophrases peuvent aussi être monolexicales, comme décidément. Dans cet article, nous allons aborder les holophrases polylexicales, phraséologismes pragmatiques. Retour au texte

2 Nous rappelons que la notion de lexiculture, introduite par Galisson (1999) et développée comme un concept lexicographique opératoire par Pruvost (2005) a été investie dans des travaux lexicographiques importants, comme le Dictionnaire québécois d’Aujourd’hui (Boulanger, 1992 ; voir à ce propos Le Gall, 2009). Ce concept est présent et très pertinent dans l’étude des phraséologismes, en l’occurrence, des phrasèmes pragmatiques, ancrés dans la culture dans laquelle se réalisent les interactions verbales qui les mobilisent. Retour au texte

3 Pour la définition et l’étude détaillée de la notion de sémio-sphère, voir Lotman, 1999. Pour notre part, nous l’appréhendons dans la perspective de la pragmatique linguistique comme la sphère des pratiques langagières, en particulier des interactions verbales, ayant pour objectif d’exprimer une intention illocutionnaire, en l’occurrence le désaccord entre les sujets qui y participent. Retour au texte

4 Le premier ouvrage dans lequel nous proposons et expliquons ce concept (Galatanu, 1984 : 128-133) a une portée d’abord théorique, le situant parmi les marqueurs linguistiques des forces illocutionnaires, mais aussi une visée applicative, puisque l’ouvrage, dans son ensemble, articule les théories des actes de langage et une approche communicative de l’enseignement des langues étrangères. Retour au texte

5 Pour la définition, la description et l’analyse des expressions figées, voir par exemple, Gross, M. (1993) ; Dostie (2004) ; Lamiroy (2008) ; Anscombre et Mejri (2011) ; Beliakov, Mejri et alii (2011) ; Klein et Lamiroy (2011). Retour au texte

6 Voir aussi Mel’cuk (1995), Gonzales-Rey (1995), Blanco Escoda et Mejri (2018). Retour au texte

7 Nous précisons que nous parlons ici de définition conventionnelle a posteriori (Martin, 1990), puisque le terme existe déjà en sciences humaines et sociales pour désigner d’autres concepts. Retour au texte

8 Voir Galatanu, 2000 : 88-91. Retour au texte

9 Galatanu, 2011, 2012a et b, 2014, 2016, 2017, 2019. Retour au texte

10 Notre approche modale dans sa première version, onomasiologique, est redevable de la description de l’intention illocutionnaire de Searle, mais aussi de la proposition d’Hermann Parret de construire une pragmatique linguistique basée sur les actes ou « attitudes illocutionnaires » du sujet énonciateur (Parret, 1976 : 47). Retour au texte

11 Voir Dostie, 2004. Retour au texte

12 Nous rappelons que la règle de contenu propositionnel formulée par Searle ([1969]1972 pour la traduction française : 105-109) concerne la prédication du contenu propositionnel, par exemple un acte futur en faveur du destinataire, pour la promesse, et qu’elle dérive des conditions de contenu propositionnel. Nous pouvons redéfinir ces conditions, qui forment les règles préliminaires, comme des conditions liées aux états mentaux de l’énonciateur (croyances, certitudes, affects) et aux hypothèses que celui-ci fait sur les états mentaux de son destinataire. Retour au texte

13 Voir aussi la description de décidément comme mot du discours (Ducrot et alii, 1980 ; Gomez-Jordana Ferary, 2020). Retour au texte

14 Galatanu, 2011, 2012 ; Bellachhab, 2012 ; Galatanu, 2014 ; Galatanu et alii, 2016. Retour au texte

15 Ces postulats s’appuient toutefois sur les hypothèses empiriques que nous avons pu formuler à partir de l’analyse des corpus, y compris de données expérimentales (voir la liste des thèses de doctorat soutenues depuis 2009 dans la bibliographie de Galatanu, 2018 ; nous mentionnons les travaux collectifs de Galatanu, Bellachhab et Cozma (2014, 2016). Retour au texte

16 En sémantique des possibles argumentatifs, qui représente le cadre théorique et épistémologique de la SIV, le noyau est formé non seulement de traits de catégorisation sémantique et syntaxique comme dans la proposition de Putnam (1975), mais également de propriétés essentielles à la reconnaissance d’un mot appris et utilisé par la communauté linguistique. Pour une description et argumentation détaillée du concept de noyau en SPA, voir Galatanu (2018 : 187-198). Retour au texte

17 Dans le cadre de la sémantique des possibles argumentatifs, dans lequel s’inscrit l’approche SIV, cette représentation sémantique est construite à partir des définitions lexicographiques, ou de textes / échanges d’experts, ou encore par une approche introspective, confrontée et confortée par l’analyse des données empiriques issues des interactions verbales, et par les résultats d’une démarche de sémantique expérimentale (Galatanu, 2018 : 261-289). Retour au texte

18 Cette analyse des holophrases en tant que phraséologismes pragmatiques rejoint sur de nombreux points également l’étude des « pragmatèmes », proposée par Blanco Escoda et Mejri (2018). Retour au texte

19 Nous rappelons qu’en SPA, ces propriétés sont sélectionnées à partir des définitions lexicographiques des mots, en sachant que le dictionnaire est appréhendé comme un discours expert du (des) lexicographe(s) sur l’état du lexique d’une langue et d’une culture, appris et reconnu par les sujets parlants cette langue (Galatanu, 2018 : 264-270). Nous faisons remarquer que la circularité du dictionnaire rend compte, d’une certaine manière, justement de l’intrication des significations lexicales dans une langue, postulée par la SPA. Ces propriétés nucléaires sont néanmoins testées et subissent une nouvelle sélection, par des tests sémantiques dans une démarche d’analyse introspective. Enfin, la première source peut être aussi un corpus de textes fondateurs de l’objet sémantique ou encore, des enquêtes auprès des sujets parlants. Retour au texte

20 Dans le tableau, SP représente le sujet parlant, D son destinataire, DONC et POURTANT sont les marqueurs du lien argumentatifs, dans la filiation de l’Argumentation dans la Langue (Anscombre & Ducrot, 1983), OU, ET sont des connecteurs coordonnants permettant d’intégrer dans la représentation nucléaire des éléments non hiérarchisés à un niveau donné de l’enchaînement vectoriel. Retour au texte

21 Tous les exemples proposés qui suivent de même que ceux qui précèdent (de 1 à 7) sont tirés de la base de données Frantext. Retour au texte

22 Qu’à cela ne tienne !, compte tenu de sa complexité sémantique qui, selon nos hypothèses, incorpore des éléments contextuels, mérite une analyse plus approfondie que nous ne pouvons pas développer dans l’espace de cet article. Retour au texte

23 Comme le remarque Dostie (2004), il est très difficile d’établir une liste exhaustive des marqueurs discursifs, et en l’occurrence, des marqueurs discursifs holophrastiques polylexicaux du désaccord. Retour au texte

24 Voir la liste dans la bibliographie. Retour au texte

25 La base d’expressions figées de Denis Le Pesant a été consultée précédemment pour des recherches sur certains aspects des holophrases (voir Galatanu, 2014, 2016). Retour au texte

26 Par exemple, l’analyse de eh bien (Galatanu, 2011 ; Galatanu & Pino-Serrano, 2012), de allons allons ! (Galatanu, 2016). Retour au texte

27 Il s’agit d’une liste constituée à partir du Petit Robert, du Petit Larousse et du Lexis, en 1988 dans l’ouvrage Interprétants sémantiques et interaction verbale. Les verbes qui y figurent ont été testés comme verbes de communication verbale, illocutionnaires et performatifs, et étudiés à partir de leur structure sémantico-syntaxique. Elle comprend : contester, contredire, démentir, disconvenir, désavouer, nier, objecter, protester, récuser, réfuter, renier, répliquer, rétorquer, se rétracter. Il est certain que cette liste, provisoire, devrait être revue et éventuellement enrichie et surtout validée par l’analyse de corpus d’interactions verbales. Retour au texte

28 Le corpus étudié était formé, comme pour les autres holophrases analysées ici, d’énoncés recueillis dans la base de données Frantext, mais également sur 15 pages sur Google, consultées le 14/04/2014. Nous allons indiquer cette dernière source pour les exemples qui en sont tirés. Ce dernier corpus avait déjà été constitué pour plusieurs recherches portant sur certains aspects du fonctionnement des holophrases, recherches qui font l’objet de deux articles : Galatanu, 2014, 2016. Retour au texte

29 Plus généralement, ces tests sémantiques sont particulièrement utiles dans l’étude des holophrases polysémiques, pour identifier la valeur illocutionnaire activée dans un contexte donné. Retour au texte

30 Il s’agit d’énoncés qui réalisent des actes rassurants, RASSURER ou CONSEILLER, ou encore PROPOSER (de se mettre d’accord) (Galatanu, 2016 : 30-31). Retour au texte

31 Cette proposition fait l’objet d’une recherche en cours qui porte sur la réfutation et sur deux autres actes de langage, l’accusation et l’aveu (pour l’analyse de l’aveu, voir aussi Galatanu, 2019). Retour au texte

Illustrations

Citer cet article

Référence papier

Olga Galatanu, « Les marqueurs illocutionnaires holophrastiques du désaccord », Lexique, 29 | -1, 75-95.

Référence électronique

Olga Galatanu, « Les marqueurs illocutionnaires holophrastiques du désaccord », Lexique [En ligne], 29 | 2021, mis en ligne le 01 décembre 2021, consulté le 17 mai 2024. URL : http://www.peren-revues.fr/lexique/120

Auteur

Olga Galatanu

Université de Nantes & PREFics EA 4246
olga.galatanu@univ-nantes.fr

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